Les journées s'enchainaient à une vitesse alarmante. Emporté par un quotidien éreintant, Caly avait la tête dans le manche à balais. Entre les arrestations, la paperasse, le léchage de cul, il ne comptait plus les heures : il rentrait tard, partait aux aurores, en bref il ne vivait plus vraiment. Et pourtant, il l'avait remarqué immédiatement, ce changement dans le comportement d'Asmodeus. Depuis quelques jours, il rentrait très tard de ses "tournées" ,complétement beurré, le regardait à peine dans les yeux. Jusque là, Way avait eu de la chance qu'Alifay fut totalement crevé de ses journées pour réagir, pour le confronter, le choper par l'oreille et le menacer jusqu'à c'qu'il crache le morceau. Voyait-il quelqu'un? Ses absences de ces derniers temps avaient-elles finies par lui ronger la bite et il avait besoin d'aller voir ailleurs ? L'idée même le rendait malade et lui mettait une rage sans limite. Putain Caly était jaloux comme jamais et ça venait à lui parasiter ses journées, il ne pensait qu'à ça, s'en faisait des images bien trop réelles qui le faisaient bouillir.

Au troisième jour, après avoir merdé une enquête car la tête ailleurs, s'en était trop : Caly devait lui mettre le nez dans sa merde, il devait le choper, même si la verité n'allait surement pas lui plaire, il ne pouvait pas continuer à se bouffer le crâne de la sorte. Il rentra un peu plus tôt qu'à ses habitudes, dans l'espoir que Way soit à l'appartement. Il ouvrait la porte sur un salon dans le noir complet, une odeur de tabac froid et de renfermé y régnait. Il n'y avait certainement eu personne de la journée ici. « Way? T'es dans le coin? » Lança-t-il sans trop de conviction. Bien sûr qu'il n'était pas la, pourquoi est-ce que le schéma aurait changé? Il ne serait pas de retour avant des heures, et dans un putain d'état second. Une terrible chaleur commençait à gonfler dans ses entrailles, le silence qui répondait à sa question l'enrageait et il aurait été capable de tout casser autour de lui. Il s'agrippa un instant à la poignée, si fort que ses jointures commençaient à blanchir, puis ferma la porte derrière lui dans un long soupire pour tenter de se calmer.

Il devait apaiser cette colère qui était doucement entrain de ramper en lui, s'insinuer dans chacune de ses pensées. Il secouait la tête à plusieurs reprises alors qu'il cherchait quelque chose à faire, pour tuer le temps, pour attendre qu'Asmo ne daigne rentrer. Oh, Caly n'était pas dupe, il savait très bien qu'il serrait les fesses et l'évitait pour pas prendre le courroux dévastateur de son cher et tendre. Mais il savait aussi que plus il attendait, plus il allait prendre cher. Et même s'il devait l'attendre jusqu'au petit matin, il ne comptait pas laisser passer un jour de mensonges de plus. Si c'était pas l'hopital qui s'fous d'la charité ça, a taste of his own medecine, combien de fois avait-il laissé Way dans cette situation? Trop de fois pour les énumérer. Mais est-ce que c'était la putain de question? Caly s'imaginait bêtement qu'en s'étant débarassé - en partie- de ses mauvaises habitudes, Asmo ne lui rendrait jamais la monaie de sa pièce.

Dans un ricanement soufflé et dans un ultime remuage de tête, il attrapa un des livres envoyés par son père et se posa dans le canapé. Ses parents avaient toujours éduqué leur fils dans l'amour des bouquins, en tant qu'enfant de libraire, le contraire aurait été étonnant. Un petit mot de sa mère glissé à l'intérieur des pages fit taire le grondement sourd en lui, et un léger sourire se dessinait même sur ses lèvres. Dante et Elise avaient ce pouvoir d'adoucir Caly, il était toujours transformé en leur présence, comme si ses démons n'osaient intervenir. Ainsi se perdit-il dans des pages et des pages d'une histoire fantastique d'un enfant illégitime abandonné et contraint à se faire à la vie dans un château s'il ne voulait pas mourir : il devint un assassin royal. Il salua l'ironie d'avoir reçu ce récit en particulier, mais ne s'en formalisait pas.

Il avait beau être absorbé par sa lecture, ses sens ne le trahissaient que très rarement et avait entendu les pas lourds d'Asmodeus bien avant qu'il n'arrive devant leur porte et réussi -non sans difficulté- à entrer la clé dans la serrure. A peine était-il entré que déjà s'embrasait l'incendie en lui. Caly ne fit pas un geste, scrutant les pages de son livre, relisant plusieurs fois la même phrase. Il savait parfaitement que du moment ou ses yeux quitteraient le papier, il ne pourrait plus stopper ce flot de rage qui était entrain de l'inonder. Il se crispa quand les bras de Way vint l'enlacer, il serrait la mâchoire à s'en peter les dents alors qu'il l'embrassait dans la nuque. Il refusait ce contact, attisant encore plus sa hargne. Il puait l'alcool et ainsi s'ajouta un peu de tristesse à sa fureur.

Je sais un truc...un truc important...Mais je peux pas te le dire.

Chacun de ses muscles étaient tendus, au point ou cela en devenait douloureux, il était prêt à bondir, à se retourner et à lui sauter à la gorge. Ca voulait dire quoi ça? Pourquoi ouvrir sa grande gueule si il comptait ne rien lui dire ? Quel était le but? Alifay prit une grande inspiration, la bloqua quelques secondes avant d'expirer un long soupire saccadé par l'animosité qui montait toujours plus. Ils savaient tout deux que du moment ou Caly allait se mettre à se mouvoir, à parler, les enfers se déchaineraient. Il y eu un long silence, trop long, le malaise était palpable. La main crispé sur son livre se détacha enfin et glissa le long du bras, puis du visage d'Asmodeus, pour venir se loger dans ses cheveux. Caly était doux, mais de très légers spasmes trahissaient l'orage qui battait en lui.

« Tu ne peux pas me le dire ? » Ses doigts se baladaient dans ses cheveux, jouant amoureusement avec, parcourant la cicatrice sur son crâne. Il avait un mal terrible à se contenir, devant fermer les yeux pour essayer de se recentrer, de faire le vide en lui. « Ou tu ne veux pas ? » Il resserra son emprise sur sa chevelure d'une poigne de fer, forgée dans les flammes de la colère. Il colla un peu plus fort sa joue contre celle de Way, au point d'en avoir mal lui aussi. « T'as pas envie que j'aille lui fumer la gueule, c'est ça? » Il parlait à voix basse, s'en était dérangeant, flippant. « J'te jure que si faut que j'retourne tout Londres, ça m'fait pas peur. » Et il le ferait, sans l'ombre d'une putain d'hésitation.

La terrible symphonie de la colère l'assourdissait, la violence battait la mesure et lui vrillait la tête. Ses doigts s'engourdissaient de douleur mais Caly ne comptait pas lâcher prise. Mais Asmo en décida autrement, préférant sacrifier une poignée de cheveux pour se libérer et lui fit l'affront de lui faire face. Ce dernier lui attrapait fermement le visage, le forçant à le regarder. Et si l'espace d'un instant, il était tenté de rester les yeux clos, il se décida à planter son regard vert et emplis de rage dans celui de Way.

Je t’ai pas trompé sombre con ! Enfin pas comme tu le crois ! Promis ma bite est restée bien ranger au chaud et la sienne aussi !

Ses sourcils ne pouvaient pas se froncer plus et Caly jurait avoir entendu une de ses molaires craquer tant sa mâchoire était crispée. Il ne s'était pas trompé, il y avait bien quelqu'un d'autre et il voulait une putain de médaille pour ne pas l'avoir baisé direct? Way lâcha son visage dans un grognement et Caly souffla de dédain. Tout en Alifay lui criait de se jeter sur Asmodeus, de lui faire bouffer ses dents, de le frapper au point qu'il n'y aurait plus aucune place au plaisir masochiste, uniquement la douleur , encore et encore jusqu'à lui délier la langue. Dans une expression dégoutée, il jeta les cheveux encore fermement tenu dans sa poigne. Ça tournait si vite dans sa tête, il y voyait déjà une centaine de façon de briser Way, par la force ou par les mots. Caly avait toujours eu cette emprise, ce pouvoir de pousser sa moitié dans ses derniers retranchements, peut être un peu trop? C'était un pouvoir qu'il avait presque peur d'user maintenant, car il ne savait pas quand s'arrêter, allait toujours plus loin, frappait toujours plus fort.

Crois moi je deviens dingue de pas pouvoir te le dire. C’est un des pire truc que j’ai eu à faire mais j’ai pas le choix. J’ai vraiment pas le choix ! Tu vas devoir me faire confiance sur ce coup là. Je suis pas un foireux après tout !

Un silence s'était installé, les explications sans aucun putain de sens essayaient de se frayer un chemin dans le crâne trop embrumé de Caly. C'était un gars perspicace, vif d'esprit, capable d'analyser une situation en quelques secondes. C'était ce qui en avait fait un bon auror, puis un bon brigadier. Mais la violence avait toujours été sa dictatrice, occultant tout autre chemin, la colère l'empêchait d'y voir clair, de tout simplement réfléchir. Son poing fendit l'air, d'une vitesse et d'une force démesurées, percutant la mâchoire d'Asmodeus et un crack tout à fait explicite raisonna dans la pièce. S'était-il brisé quelque chose? Ou les dégâts étaient-ils côté victime? L’adrénaline était montée si haut qu'il ne ressentait aucune douleur et honnêtement, il n'en avait rien à foutre. De son autre main, il l'attrapa à nouveau par les cheveux, rien à battre si ça avait un côté redondant, et approcha son visage du sien.

« C'est pourtant pas si compliqué de dire : "Caly, j'veux baiser ailleurs, on y va molo parce qu'en réalité on s'aime et c'est la meilleure chose qui me soit arrivée". R'garde toute la merde que t'arrives à débiter, tout ce blabla qui ne sert à rien, alors que tu as juste un nom à me donner. On y gagnerait tous un temps précieux. »

Il le relâcha avec écœurement avant de s'écarter en lui tournant le dos. Caly passa les mains dans ses cheveux avec force, massant son front avec les paumes de ses mains. Il devait reprendre son calme, mais c'était si dur. Il n'arrivait pas à faire taire l'horrible créature qui grondait au fond de ses entrailles, prête à bondir et à se déchaîner. Il n'arrivait pas à y voir clair, il voulait frapper, cogner, détruire. Il envoya valser la table basse d'un coup de pied dans un cri étouffé. Il avait cette putain d'impression de déjà-vu, il voyait l'histoire se répéter devant lui, quand Caly l'avait poussé si loin qu'Asmodeus avait finir par partir. Et il n'était pas prêt à revenir ça, ni aujourd'hui, ni demain, ni jamais.

Combien de temps était-il resté la, debout comme un con, dos à Way? Quelques secondes? Quelques heures? Il en avait perdu la notion du temps. Dans un long, très long soupire, Alifay vint poser un genou devant Asmodeus, et posa sa main dans la sienne. C'était si compliqué, si terrible de ne pas céder à ses pulsions, aux hurlements de rage qui raisonnaient en lui. Mais s'il voulait éviter de répéter les erreurs du passé, Caly devait prendre sur lui, même si ça lui faisait mal au bide tant il essayait d’intérioriser toute cette colère. C'était un coup à se faire un putain d'ulcère.

« Asmo. » Il essayait de parler de manière douce, mais seule une voix dangereusement calme sortait de sa bouche. « Faut qu'tu t'exprime clairement, je comprend rien. » Son visage se fendit d'un petit sourire qui était terriblement dérangeant. « Donne moi son nom, sinon j'vais tout faire flamber, nous avec.» Alifay déposait une caresse sur la mâchoire qu'il avait cogné avant. « Ou seulement son adresse, tu n'auras même pas besoin de m'accompagner. Et après, tout rentrera dans l'ordre, d'accord ? »

Beaucoup de sang était déjà entrain de couler cette nuit, et rarement Caly avait regretté son geste aussi vite. Parfois ça prenait des jours, et parfois ça ne venait pas du tout. Mais cette fois ci, de voir Asmodeus assommé par cette violence, venait naître en lui un terrible sentiment de culpabilité. Ça n'avait toujours été qu'un jeu morbide entre eux, mais si l'un ne jouait plus, alors ça n'avait aucune saveur.

Tu comprends pas Caly. J’ai promis ! Un promesse de sang. Son nom n’y changera rien ! Son adresse non plus.

Ses yeux s'attardaient sur cette grande entaille. Non il comprenait rien, qu'est-ce que c'était cette histoire? Avec qui? Puis un pacte du sang, on était ou la? Et puis ils s’étaient crachés dans la main aussi non, histoire d'accentuer le délire d'ado? Et en quoi un tel pacte pourrait l’empêcher de parler? Il se leva, prêt à frapper à nouveau.

Pire encore j’ai fais un putain de serment inviolable avec lui ! Si je te révèle la vérité Caly j’en crève sur place.

Son cœur rata un battement, puis deux, puis trois. Qui était ce mec, quel importance avait-il pour Asmodeus, qu'avaient-ils à cacher de si énorme pour se lier d'un pacte si lourd? Ça lui broyait le bide de se dire qu'il y avait quelqu'un dehors, en qui Way avait assez confiance pour se lier de la sorte. Égoïstement, il se pensait le centre de son monde. Il était jaloux, envieux de ne pas être cette personne qui était si étroitement enchainée à Asmodeus. Instinctivement, il se raidit quand il vint se loger contre lui, les bras le long du corps, pas un geste pour l'enlacer. Ce n'était pas vraiment volontaire, il était dans ses pensées, partagé entre des émotions toutes contradictoires, mais chacune d'une intensité terrifiante.

Tu veux que je te crève entre les doigts pour avoir la vérité ? C’est ça ? Je t’aime moi je veux pas crever je veux rester avec toi pour toujours, j’ai besoin de personne d’autres ! Fait un putain d’effort pour comprendre !

Quelques secondes passèrent, avant qu'il n'entoure Asmodeus de ses bras tremblant. De colère, de rage mais surtout de désespoir, de détresse. Il existait de rares moments ou Caly n'arrivait pas à l'ouvrir, n'avait pas une remarque acerbe à servir, le visage transpirant la moquerie, les yeux brillant de rage. Le regard accroché dans le vide, il s'était muré dans un silence assourdissant. Tant de questions tournaient dans sa tête, Asmo avait pu répondre à certaines mais cela en avait soulevé tant d'autres. Il accentuait un peu plus son emprise sur Way, le collant encore plus fort contre lui. Il avait mis tant de temps à se l'admettre putain, mais Caly l'aimait à en crever et l'idée même qu'il puisse appartenir à quelqu'un d'autre, qu'importe la manière, le fissurait de part en part. Never trust a hug, it's just a way of hiding your face. Sa tête se plongeait dans ses cheveux pour cacher des yeux presque humides. Alifay était désemparé, il n'arrivait pas à relier les points dans cette histoire insensée, pour pouvoir en comprendre la finalité. En fait, il se sentait trahis, et il ne pensait pas avoir déjà ressenti ça dans sa relation si longue et tumultueuse avec Asmodeus.

« Je... » Caly se racla la gorge pour faire fuir ce quelque chose qu'il avait en travers de la gorge. Il l'écarta un peu de lui, le tenant par les épaules. « C'est pas simple de comprendre pourquoi t'as lié ton âme avec celle d'un autre homme. C'est impossible de saisir le putain de sens de tout ça, ok? » Sa voix était basse, on pouvait presque y desceller l'impact que ça avait sur lui. Il essayait de trouver des réponses dans ces yeux qui le fixaient, mais il n'y avait la que le regard du mec qui arrivait toujours à l'atteindre lorsqu'il s'y attendait le moins. Son visage était entrain de se durcir, ses doigts s'enfonçaient un peu plus dans les épaules d'Asmodeus. Son cœur tapait si fort contre sa cage thoracique que ça lui faisait mal. Très mal.

« On va aller le voir. La, maintenant. Et on va rompre cette connerie qui te lie à lui. » Sa phrase commençait à être hachée par la colère qui revenait doucement, mais surement, en lui. Il reculait vers la porte de l'appartement, tout en emportant Asmodeus avec lui, le dirigeant avec fermeté mais sans aucune violence. « Et si la seule solution pour te sortir de la merde ou tu t'es foutu, c'est de le butter, alors je le ferais. » Un affreux sourire s'était dessiné sur son visage pale. « Je l'ai déjà fait, alors je recommencerais, sans hésitation. » Il passa sa main dans son propre dos pour ouvrir la porte, laissant entrer l'air frais d'une nuit londonienne déjà bien entamée, invitant Way d'un mouvement de tête à lui montrer le chemin.

Ok je t’emmène, mais il faut encore que tu sache quelque chose. J’ai en grande partie fait ça pour toi. Je sais que tu ne fais pas forcément confiance à mon jugement, mais crois moi tu le regrettera terriblement si tu le butte. Pense y si tu te retrouve aveuglé par la colère ! Ne le butte pas ! Surtout pas !

Ses mots, il se les passait en boucle pendant tout le chemin alors qu'il mémorisait exactement le chemin à prendre si il devait revenir, si leur cible venait à s’échapper. Caly savait qu'Asmo ne pouvait pas en dire plus sans risquer d'y perdre la vie, mais putain ça n'avait toujours aucun sens. Pourquoi il ne devait pas l'abattre, si ça réglait le problème? N'était-ce pas ce qu'ils étaient parti faire, la? Et quel rapport avec Alifay ? Plus il avançait, moins il comprenait, happé dans une histoire dont il ne connaissait ni les tenants ni les aboutissants, et ça le rendait marteau. Il essayait tant bien que mal de chasser cette migraine qui s'installait doucement autour de son esprit déjà trop malmené, merde c'était pas le monde de défaillir.

Il avait perdu le fil l'espace d'un instant et ne savait déjà plus ou ils étaient, ils avaient pris à gauche ou à droite la? Il jura tout bas alors qu'ils faisaient déjà face à l'entrée d'un appartement qu'il ne connaissait pas. Il accueillit la main d'Asmodeus presque avec soulagement, son seul point d'encrage au milieu de cette tempête qu'il avait lui même crée. La porte s'était ouverte à la volée, peu de temps après avoir frappé, et Caly mis un peu de temps à remettre un nom sur le visage qui se découpait dans une lumière trop vive. C'était pas le p'tit con qu'il avait fait chanter, quelques mois avant? Qu'est-ce que Way avait bien à faire avec lui? Sa main se resserrait dangereusement autour de celle d'Asmo. Essayait-il de le faire chanter en retour pour se venger d'Alifay?

" Asmo tout vas bien? T'as pas l'air très en forme la. Qu'est ce tu fous avec mon capichef derrière toi?" Le son même de sa voix accentuait sa rage. "Asmo", sa façon de s'adresser à lui comme si ils se connaissaient depuis tout le monde faisait gonfler cette jalousie, ce sentiment de trahison, sa peine mais surtout, sa colère. " Bon maintenant que vous m'avez niqué ma soirée. Je peux faire quoi pour vous? Je tiens quand même à souligner qu'il est tard." Mais qu'il la ferme, par les couilles de Merlin, qu'il la ferme ! Il se permettait de lui faire un petit coucou complice en plus de ça, comme s'il savourait sa victoire. Caly avait ce besoin implacable de lui éclater sa petite gueule d'ange, lui fourrer son petit air supérieur dans un endroit sur, mais surtout lui faire fermer son claque merde. " T’es venu chercher ta pizza, c’est ça? ?" Asmodeus lâcha sa main, non non c'était vraiment une mauvaise idée, Caly allait se faire emporter dans l'ouragan qui détruisait déjà toute raison en lui. Mais ce n'était pas son poing qui percuta le visage de ... - merde? c'était quoi son nom déjà? Melanie? Non... Malchior! - de Machin, mais celui de Way, ce qui leur offrait une faille pour s’engouffrer chez le maigrelet qui pensait faire barrage de son petit corps. Alifay ne pu s'empêcher de ricaner alors qu'ils prenaient déjà place dans ce qu'on appelle une violation de domicile.

Est ce qu’on a une putain de tête à être venu chercher des Pizza ?

Putain mais encore cette histoire de pizza? Un mot de code ou quoi? Il voyait bien ce regard si intense que son brun lui lançait et n'arrivait pas à en saisir l'essence. Les yeux brillant d'une folie furieuse se posaient à son tour sur le mec qui avait le cul par terre. Il était à sa juste place, à leurs pieds, à leur putain de merci. Il avança d'un pas, puis deux, se glissa dans son dos et passa trop délicatement sa main dans la nuque de leur victime avant d'y imposer une pression certaine. Il s'était accroupi dans un petit soupir, ses lèvres proche de son oreille s'ouvraient pour laisser passer un murmure.

« T'as cinq minutes pour m'expliquer cette histoire, m'expliquer comment rompre votre pacte de merde et enfin m'expliquer pourquoi j'dois pas t'égorger. »

Un éclair argenté apparu dans sa main libre, pas assez proche encore de la gorge de Machin, mais assez proche pour qu'elle devienne un adversaire redoutable.

"Alors. Je l'ai croisé dans un bar, il avait faim alors je l'ai nourris avec ma pizza. Et du coup pour être sur qu'il allait me rembourser on a fais un serment. On était grave déchiré. C'est tout simple." Caly ne pu s'empêcher de souffler un rire moqueur. Il était vraiment entrain de le prendre pour un con, la? Il resserra sa prise sur sa dague mais ne fit aucun geste. Il lui avait donné cinq minutes et ne comptait pas agir avant que le temps ne soit écoulé. Et pourtant, c'était pas l'envie qui lui manquait. "Bon tu vas me lâcher la ou tu comptes continuer à me menacer chez moi la ? On a pas baisé non plus avec ton mec, pas besoin d'en faire toute une histoire la, y à rien alors vous pouvez repartir tranquille." Ca, étrangement, semblait être la seule part de vérité dans tout son déballage de merdes.

Sa posséssivité en était soulagée, mais l'incomprension demeurait toujours, pourquoi avoir fait un serment inviolable? Pour quelle raison tordue ces deux là s'était liés? Qu'essayaient-ils d'accomplir? Perdu dans ses pensées, il ne remarquait Asmodeus à ses côtés qu'une fois qu'il s'était mis à parler. Souviens toi de ce que je t’ai dis. Tu le regretterais ! Mais POURQUOI regretterait-il d'ôter la vie d'un gars qu'il connaissait à peine? Au de-là du fait que tuer c'est pas bien, ca n'avait aucun sens. Je te présente Caly Alifay. Mon « colocataire »…L’amour de ma vie. Et c’est lui m’a mis la gueule comme ça alors crois moi que avec toi il hésitera pas deux minutes. Avait-il déjà entendu Asmodeus le désigner de la sorte à quelqu'un d'autre, en plus de quinze ans? Surement pas, et ce sentiment d'importance faisait bruler une douce chaleur en lui, pas de celle qui détruit tout comme d'habitude, mais celle qui réconforte, qui adoucit, qui calme.

Oui il y’a bien une histoire de pizza...mais c’est pas vraiment la raison majeure de ce serment. On n’était bien déchiré et euh ouais on a pas baisé. D’ailleurs j’attends toujours de voir la couleur de cette putain de pizza. Parce que y'avait vraiment une histoire de pizza dans ce pacte? Si le lien entre eux n'était pas si puissant, si grave, si mortel, Caly aurait pu en rire tellement c'était si con, si inattendu, si Asmodeus Way. Ce serment je l’ai putain de fait pour vous protéger tous les deux de vous-mêmes. Il a deviné qu’un truc tournais pas rond, je t’ai dis je peux pas lui cacher grand-chose. Et toi Mal crois moi que tu vas pas prendre Caly pour un con comme ça et moi non plus au passage. Tu vas gentiment reprendre tes esprits et tout lui expliqué parce que tu sais bien que moi je peux pas ! Il n'avait pas vraiment besoin d'avoir la confirmation de Way que ce Mal' lui servait de la merde et s'attendait à ce qu'il la mange sans broncher. Mais ça avait un côté satisfaisant de ne pas voir Way valider ces mensonges. Peut être allait-il enfin finir par comprendre c'était quoi ce bordel dans lesquels ils semblaient d'être foutu tout les deux? Et pour quelle raison tordue Caly faisait-il parti de l'équation?

Il rangea sa dague dans sa manche aussi vite qu'il l'avait sorti et relâcha sa prise sur sa victime. Alifay se plaça devant l'homme à terre, le surplombant de toute sa hauteur et lui tendit la main pour l'aider à se relever. Une fois sur pied, Caly défroissa les vêtements de Mal de quelques gestes secs et précis et lui offrit un sourire détendu, comme si rien ne s'était passé.

« Techniquement, il te reste encore trois minutes, mais comme je suis un gars sympa, je t'en offre cinq de plus. Par contre arrête de me prendre pour un con, ça va commencer à être vexant. » Il rigola un bon coup en posant ses deux mains lourdement sur chacune de ses épaules. « Et t'as pas envie de me voir vexé! » Il fit un petit mouvement de tête à Asmodeus pour lui montrer qu'il avait bien compris son message, qu'il s'était calmé, mais il pouvait toujours entendre le tonnerre gronder au loin.

Il le regardait s'éloigner d'un pas, puis un deuxième. Caly répondit d'une moue faussement vexée, il ne pouvait pas vraiment lui en vouloir de se mettre hors de sa portée. Mal' était nerveux, ça transpirait dans chaque pore de sa peau, dans chacun de ses gestes, chacun de ses regards. Pourquoi la présence d'Alifay le rendait si angoissé, au delà du fait qu'il menaçait de le tuer? Etait-ce le chantage vis à vis de son père? Caly n'avait qu'une parole, et avait détruit le souvenir en question. D'ailleurs, si il n'avait pas revu sa gueule ce soir, il l'aurait certainement effacé à jamais de sa mémoire. "Bon. C'était juste pas à toi de choisir ça." Alifay se retourna un instant vers Asmo en relevant un peu les épaules de manière ridicule, il approuvait la décision de sa moitié et le signifia par un pouce en l'air avant de nouveau faire face à Malachaï.

" En faite, je suis venu toquer à ta porte y à quelques jours. Parce que je te cherchais. Sauf que je t'avais jamais vu, enfin je savais pas que c'était toi au ministère. D'ailleurs t'es bien foutu de ma gueule quand j'y pense." Comment ça il le cherchait? Puis il savait bien qui il était, vu qu'il l'avait blackmail pendant plus d'un mois. Il était complétement beurré ou il était encore entrain de lui raconter des conneries, la? Il inclina un peu la tête, affichant une mine à la fois curieuse et troublée."Bref et du coup j'ai cru que Asmo c'était toi et ça à été tout un bordel et en faite on s'est rendu compte que je m'étais gourré. Et lui aussi, il m'as pris pour son frère." Il l'observait sans cligner des yeux, essayant de saisir l'essence de ces paroles, cherchant une réponse sur ce visage lisse, à la recherche du moindre mensonge. Au vu de la panique qui semblait battre en lui, ce qu'il était entrain de déblatérer était vrai. Mais il n'arrivait toujours pas à comprendre en quoi ça le concernait toutes ces conneries. " Sauf que moi je cherchais le mien et je savais juste qu'il s'appelait Caly. J'ai eu ton adresse facilement avec le ministère." Son sourire d'habitude si éclatant, s'était lentement affaissé. Son regard si flamboyant, s'était éteint. Son visage habituellement pale, était livide à présent. "Si tu pouvais éviter de me frapper, j'en serais ravis."


D'une vitesse qui le surprenait lui même, il attrapa Malachaï par le col et le colla contre le mur dans une violence inouïe. D'un geste, il apporta son doigt à ses propres lèvres pour lui signifiait qu'il avait intérêt à la boucler, que Caly puisse réfléchir, penser, démêler tout ça. Il dévisageait cette face qu'il n'aurait jamais voulu connaître, y cherchant la moindre ressemblance, ou plutôt une preuve que c'était d'la merde, qu'il s'était planté d'gars, qu'au ministère ils s'étaient foutu de sa gueule, une mauvaise blague. Et pourtant il ne pouvait pas ignorer ce nez, la forme de sa mâchoire et cette insolence dans son regard, il ne pouvait nier qu'il lui ressemblait beaucoup trop. Une terrible douleur se réveillait dans son bide, une vérité qu'il préférait enfouir depuis des années était revenu avec force : cette famille qui avait préféré le jeter à la mer plutôt que d'assumer d'avoir un gosse fini à la pisse. Pourquoi ils ne l'avaient pas balancé lui? Parce qu'il était mieux que Caly? Se pensait-il supérieur à lui, d'ailleurs? Parce qu'il avait réussi la ou Alifay avait échoué? Il était entrain de bouillir de l’intérieur, contractant chacun de ses muscles et sa mâchoire, le regard vert toujours intensément planté dans celui bleu, de son ... frère. Il leva son poing d'un geste brusque, prêt à frapper.

« Nope. Nope, nope, nope, nope.» Murmurait-t-il en secouant la tête comme s'il essayait de chasser tout ça de son esprit. Il relâcha sa prise, les deux mains en l'air, les doigts écartés, reculant de quelques pas. « Rien à foutre. » Dos tourné, il s'était pris le front entre ses mains l'espace d'une seconde avant de se retourner une nouvelle fois vers Malachaï, ce frère sorti de nul part qu'il ne voulait pas, et le pointait d'un doigt tremblant. « T'as passé plus de vingt ans de ta vie sans moi, crois moi que c'est pas aujourd'hui que ça va changer. » Dans ses yeux brillaient une rage terrible, mais aussi quelque chose qui n'arrivait pas souvent : une tristesse, qui les rendait humide. « Tu pensais quoi? Que j'allais te faire entrer dans la mienne, qu'on allait se raconter toutes ces années perdues autour d'un bon verre de Whisky? Tu t'fous ta baguette dans l'oeil mon pote. J'en ai rien à foutre, j'ai pas besoin de toi, j'ai besoin de personne. » Parler lui faisait mal, les mots peinaient à sortir entre ses dents compressées par la colère. D'un pas vif, il se dirigeait vers la porte tout en assénant un grand coup d'épaule à Asmodeus. Il devait se barrer maintenant, sinon il allait foutre le feu à ce putain d'appartement trop propre, il allait se déchainer sur ce putain de visage trop lisse et se vengerait sur Way juste après. S'il ne partait pas maintenant, il perdrait le contrôle sur lui même, et embrasserait cette folie qui lui hurlait de tout détruire. La main agitée posée sur la poignée, il lâcha un vague « Allez vous faire foutre. » avant d'ouvrir et de disparaitre dans la nuit, amie qui l'enveloppait, cachait sa haine, et ses larmes.